Virage digital dans la maintenance ferroviaire
L’innovation digitale est partout aujourd’hui sur le réseau ferroviaire où les enjeux de modernisation sont cruciaux pour répondre aux besoins d’une mobilité à la fois plus intense et plus durable. Innovation dans les matériels roulants, mais aussi sur l’infrastructure et les voies, les deux territoires privilégiés d’ETF. Une mutation qui impacte fortement nos modèles de maintenance.
La digitalisation du ferroviaire s’inscrit au cœur d’une vaste problématique complexe : régénérer et sécuriser un vaste patrimoine vieillissant tout en préparant le réseau du futur qui devra être plus capacitaire et toujours plus robuste. Cet équilibre entre modernisation et innovation du réseau mobilise des moyens considérables de la part de l’Etat, de la SNCF et des collectivités.
Dans la seule région Pays de la Loire par exemple, la SNCF a annoncé début 2025 un plan d’investissement de plus d’un milliard d’euros dans la digitalisation des postes d’aiguillage. Objectif : augmenter le trafic sur les voies sans ajouter de nouvelles infrastructures ferroviaires. Car la digitalisation du réseau doit en effet permettre de faire circuler plus de trains, plus à l’heure – et avec toujours plus sécurité – sur une même infrastructure, en tirant pleinement parti de la connectivité et de la centralisation des données.
Le BIM, futur de la maintenance prédictive appliqué au ferroviaire
La donnée, collectée et exploitée, partagée à grande échelle, devient ainsi un actif stratégique pour tous les opérateurs. Sa gestion appliquée à la maintenance permet de bâtir des modèles prédictifs que développent les deux entités du Groupe VINCI Railways, LISEA et MESEA sur LGV Sud Europe Atlantique. SE@Cloud marque une nouvelle étape dans l’exploitation de la donnée au service de la maintenance ferroviaire.
Sa mission est de valoriser l’ensemble des données d’exploitation issues de la Ligne Tours Bordeaux pour répondre aux nouveaux enjeux liés à l’intelligence artificielle et à la maintenance prédictive. Concrètement, SE@Cloud traite cycliquement en masse d’énormes quantités de données issues des installations elles-mêmes (objets connectés), de la surveillance embarquée, de saisies manuelles, de flux externes (météo, plan de transport…).
SE@cloud automatise les traitements répétitifs et peut utiliser l’intelligence artificielle pour développer des restitutions numériques utiles pour maintenir le patrimoine : état des installations au présent et extrapolations à différents horizons, modèles de dégradation, détection des comportements anormaux, etc.
Les opérationnels et décideurs accèdent en temps réel à ces résultats via des outils web de business intelligence et des systèmes d’information géographiques. Ils peuvent ainsi adapter les plans de maintenance et de renouvellement selon l’état réel des équipements et le trafic supporté, et d’anticiper, par une maintenance prédictive, les défaillances avant qu’elles ne surviennent.

Sur la ligne Dax–Bayonne, ETF a conçu pour la première fois un modèle 3D complet intégrant les profils de terrain, les voies et les supports de caténaires. Ce projet sert de démonstrateur : il illustre comment la donnée, intégrée dès la conception, facilite la maintenance et la traçabilité futures.
Aujourd’hui c’est à un véritable BIM que rêvent les ingénieurs et les data analystes d’ETF ; BIM pour Building Information Modeling. Initialement conçu – comme son nom l’indique – pour le bâtiment, ce modèle inspire la maintenance ferroviaire. Le principe ? Une maquette numérique qui va au-delà de la 3D, qui ne se limite pas à la représentation graphique du réseau. Grâce au BIM, chaque élément de l’infrastructure devient une source de données exploitable pour une maintenance prédictive. Résultat : une vision globale et partagée, accessible aux ingénieurs comme aux opérateurs de terrain, et pour, in fine, un meilleur service rendu aux clients finaux : les voyageurs.

RENCONTRE AVEC RACHID HARTOUN
Responsable des bureaux d’études caténaires chez ETF
Le BIM : une nouvelle dimension à la modélisation 3D
« Le BIM est un outil beaucoup plus puissant que la 3D. Avec la 3D, on modélise le projet : on voit la position des supports, des rails, des caténaires… Avec le BIM, on y ajoute plusieurs dimensions : le temps, le coût, la durée de vie des pièces. On peut savoir combien coûte un poteau, combien de temps il faut pour le poser, et même planifier tout le chantier à partir de ces données. Mais la vraie révolution, ce sont les métadonnées. Sur chaque support, on renseigne le type d’acier, la hauteur du fil de contact, le numéro de lot, la date de pose… Si une pièce s’avère défaillante, on peut retrouver en quelques clics tous les endroits où elle a été utilisée. »
GéoVoie sur LGV :
Exploitant les données issues de SE@Cloud, GéoVoie est le jumeau numérique de la géométrie de la voie qui répond aux besoins de 3 horizons :
- Court terme : répondre aux normes de géométrie pour permettre la circulation des TGV à V320
- Moyen terme : programmer les campagnes de bourrage dressage mécanique lourd au plus juste, ni trop ni trop peu
- Long terme : recaler le programme de renouvellement de la voie (RB, RVB) pour le Concessionnaire LISEA
En conjuguant innovation digitale, maîtrise des données et savoir-faire terrain, ETF contribue à construire le modèle de maintenance ferroviaire de demain : plus prédictif, plus durable.
